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   Je fus chaleureusement accueilli par les parents de Marc. Notre entrevue se fit de manière conviviale ; ils connaissaient peu Vincent mais étaient enclins à me parler de leurs enfants, qui, en tant que jeunes adultes, délaissaient beaucoup trop la maison parentale à leur goût : « Ils nous manquent », me confièrent-ils. De souvenir en souvenir, j’en connaissais maintenant long sur Marc et Sarah, mais rien qui ne me semble capital. Jusqu’au moment où James, leur père, prononça le mot « oreillons ». Cette maladie avait affecté Marc durant son adolescence et les avait visiblement marqués. L’atmosphère devint glaciale ; je sentis leurs sourires se changer en grimaces de gêne. Un silence pesant se fit et Sylvie restait à l’écart, tremblante et bouleversée. Qu’était-il en train de se passer ? James prit enfin la parole et m’annonça que cette maladie avait eu de fâcheuses conséquences pour leur fils : il était devenu stérile. Cela avait été un choc quand ils l’apprirent. On leur avait pourtant expliqué que cette complication était rare… Mais elle ne l’avait pas épargné. « Nous n’en avons jamais reparlé avec Marc depuis qu’il a quitté la maison, encore moins avec sa femme, Gabrielle. Nous ne savons pas comment ils gèrent cette situation. » Voilà un point qui s’éclaircissait. Les oreillons…ce fameux papier déchiré… L’étau se resserrait autour de Marc…

Mais je ne comprenais toujours pas le lien avec Vincent.

   

   Je décidai alors de rencontrer le couple. Me confieraient-ils leur désarroi ? Nous étions en fin d’après-midi, j’espérais que les deux seraient présents. Malheureusement Gabrielle était seule. Elle m’accueillit tout aussi chaleureusement que  l’avaient fait les parents de Marc. La discussion commença très légèrement, nous parlâmes de ses beaux-parents que je venais de rencontrer, de Vincent dont elle parla avec beaucoup de chaleur. Je lui proposai une cigarette qu’elle refusa poliment. Je la questionnai alors sur la maladie que Marc avait contractée adolescent. A son regard, je compris qu’elle n’en savait rien ou alors était-elle bonne comédienne. Tout se mélangeait dans ma tête : devais-je lui révéler tout ce que je savais et entrer ainsi dans l’intimité de leur couple ? N’était-il pas temps de me rétracter ? Impossible… J’étais là, si près du but… Alors je poursuivis…avec le plus grand tact possible : les oreillons… la stérilité de Marc…. Instinctivement elle posa ses mains sur son ventre. Je fus étonné de son réflexe, si propre aux femmes enceintes. Perdu dans mes pensées, je relevai la tête et vis que des larmes perlaient sur le visage de Gabrielle. « Je suis enceinte de trois mois… Nous venons de faire l’échographie avec Marc… Il n’aurait pas fait de mal à Vincent… » Vincent ? Pourquoi prononçait-elle son nom ? Je l’interrogeai du regard et elle comprit au même instant qu’elle en avait trop dit. Il était temps de parler…

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